18 avr. 2015

[Fr] Une madeleine de Proust qui vous flanque la frousse ¤ [En] A madeleine of Proust that gives you the willies

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[Fr]

[En]

Le monde dans lequel on vit aujourd’hui me laisse perplexe et ne m’invite pas souvent à l’optimisme.

Journal télévisé après journal télévisé, reportage après reportage, la question se fait toujours plus pressante : le genre humain est-il vraiment aveugle au point de ne pas se rendre compte qu’il court à sa propre perte ?

A chaque nouvelle découverte, à chaque nouvelle avancée, la beauté et l’émerveillement qu’elles suscitent cèdent peu à peu la place à une inquiétude toujours plus poignante.
A chaque nouvelle technologie, j’avale ma bile en imaginant ses usages détournés.

The world we live in today puzzles me and doesn’t often encourage me to be optimist.

Television news after television news, reportage after reportage, the question becomes even more insistent: is humankind too blind to realize they are on the road to their own ruin?

At each new discovery, at each new advance, the beauty and wonders such things arouse little by little give way to worries ever more so harrowing.
At each new technology, I swallow my bile picturing their misappropriate uses.



Un simple exemple.
A l’invention de l’imprimante 3D, si à côté de moi on s’enthousiasmait devant la prouesse technique, la première chose à me traverser l’esprit était : encore un moyen de se procurer un flingue !

Flippant, non ?

Ca n’a pas loupé, quelques temps après, un étudiant texan faisait la Une : Cody Wilson (triste membre du top 15 des individus les plus dangereux au monde, rien que ça !) créait le premier modèle d’arme à feu 3D.
Un nouveau moyen de se procurer une arme à moindre coût dans un pays où le port d’arme est un droit constitutionnel, tellement ancré dans la culture américaine qu’il serait impensable de vouloir même tenter de l’amender.
Barack Obama en a fait les frais et a évoqué un examen de conscience national. Il considère son échec face au Congrès comme la plus grande frustration de sa présidence.

Les autres applications de l’imprimante 3D – pratiques au quotidien, médecine, architecture, art  – sont venues après. Je n’ai vu que le négatif en premier.

Je m’efforce à ne pas sombrer dans le pessimisme. J’estime être réaliste, mais la réalité actuelle est flippante. Le potentiel bénéfique est là, bien présent, c’est indéniable. Le potentiel néfaste l’est tout autant, si ce n’est plus de par la nature belliqueuse de l’homme.

One mere example.
At the invention of the 3D printer, if next to me they were getting very enthusiastic about the technological feat, the first thing to cross my mind was: another way to get a gun!

Creepy, huh?

And sure enough, it happened. A little while later, a Texan student made the headlines: Cody Wilson (sad member of the top 15 of the most dangerous people in the world, no less!) created the first 3D printable firearm.
A new way to get a weapon cheaply in a country where carrying a gun is a constitutional right, so deeply rooted into the American culture that it would be unthinkable to want to even attempt to amend it.
Barack Obama bore the brunt of it and evoked a national soul-searching. He deemed his failure in the face of Congress his biggest frustration as President.

The other applications of the 3D printer – every day uses, medicine, architecture, art – came afterwards. I only saw the negative aspect at first.

I force myself not to sink into pessimism. I consider myself to be realistic, but the current reality is a real downer. The beneficial potential is here, that’s undeniable. So does the noxious potential, even more so with the bellicose nature of mankind.

The Deluge ¤ Francis Danby (1840)
The Tate Gallery

S’il existe un Dieu, si comme on me l’a asséné au catéchisme, Il a créé l’Homme à Son image, pourquoi l’avoir créé ? Pourquoi donner naissance à une créature incapable d’apprécier, à quelques exceptions près, la beauté du monde qui l’entoure ? Incapable de coexister avec l’autre ? Incapable d’appréhender les possibles conséquences de ses obsessions ?

D’ailleurs, au passage, rétablissons un peu un semblant de vérité.
Le Déluge n’est pas un récit hébraïque mais sumérien, il s’agit en fait d’une partie de l’œuvre littéraire la plus ancienne de l’humanité – tablette XI de l’Epopée de Gilgamesh, découverte et déchiffrée en 1872 par George Smith (1840-1876) du British Museum.
Récit de l’ancienne Mésopotamie (actuelle Irak), vers 700 av. J.-C., la première version complète rédigée en akkadien remonte à 18ème siècle av. J.-C., l’Epopée de Atrahasis, elle-même inspirée de plusieurs poèmes sumériens du 3ème millénaire av. J.-C., centrée autour du personnage Gilgamesh, cinquième roi de la première dynastie d’Uruk, qui provoqua la colère des dieux dans sa quête à l’immortalité. Gilgamesh aurait vécu aux alentours de 2700 av. J.-C..

Digression à part, voilà bien la source de ma présente nostalgie : l’immortalité.

Etrange madeleine de Proust me direz-vous.

Certes.

If a God does exist, if as I was told at Sunday school, He created Mankind in His own image, why creating them? Why give birth to a creature unable to appreciate, with a few exceptions, the beauty of the world surrounding them? Unable to coexist with the other? Unable to grasp the possible consequences of their obsessions?

Anyway, in passing, let’s reestablish a little semblance of truth.
The Flood is not an Hebraic narrative but a Sumerian one, it’s actually part of the most ancient work of literature of humankind – tablet XI if the Epic of Gilgamesh, discovered and deciphered by George Smith (1840-1876) of the British Museum.
Narrative of the ancient Mesopotamia (current Iraq), circa 700 BC, the first complete version written in Akkadian dates back to the 18th century BC, the Epic of Atra-Hasis, itself inspired by numerous Sumerian poems of the 3rd millennium BC, focused around Gilgamesh, fifth king of the first Uruk dynasty, who aroused the gods' wrath in his search for immortality. Gilgamesh is said to have lived circa 2700 BC.

Digression aside, here is the very source of my present melancholia: immortality.

Strange madeleine of Proust I hear you say.

Indeed.


Epic of Atrahasis
Flood tablet - Epic of Gilgamesh
Gilgamesh ¤ George Smith (1876)
D'après la sculpture de Khorsabad

15 ans plus tôt – Cesson-Sévigné, Lycée Sévigné le bien nommé.

A l’occasion du Printemps des poètes, le lycée proposait d’exposer les œuvres d’élèves qui souhaitaient participer. Certaines de mes premières suites de mots se sont ainsi retrouvées placarder à droite à gauche. Des proses principalement sur Mère Nature, la mort et le souvenir, rien de transcendant, mais premiers regards étonnés et compliments de tiers et premiers instants de fierté pour quelques mots alignés.

Je me souviens d’une conversation avec mon prof d’SVT – Monsieur Boëdec – trentenaire passionné par sa matière, jamais à court d’anecdotes, le genre de profs qu’on adore.
Le couloir était quasiment vide ; je devais sûrement griffonner quelques mots sur un cahier.

Il devait avoir lu quelques unes de mes suites de mots parce que l’une de ses premières questions concernait mon choix de filière : pourquoi la filière scientifique et non la filière littéraire ?

Réponse toute simple : j’aimais les sciences et si je dévorais de plus en plus de livres (à commencer par Asimov et la trilogie de Tolkien dévorée en moins d’une semaine et dont l’adaptation du premier volet venait tout juste de sortir au cinéma), je n’avais découvert Charles Baudelaire et mon goût pour la langue française que cette même année – merci Madame Windenberger.
Sans compter que choisir une filière littéraire cela voulait dire, plus d’SVT, plus de physique-chimie, moins de maths, reprendre le latin, commencer la philo et commencer le grec ou une troisième langue vivante, tout ça en plus de l’espagnol et de l’anglais. Et les langues, à l’époque, c’était pas mon truc du tout, mais alors, pas du tout.

A cela, il m’a raconté que pour lui c’était pareil mais qu’à l’époque il écrivait des histoires pour le journal du lycée.
Puis il m’a demandé si j’avais envie d’écrire un roman un jour ou si je voulais juste écrire des poèmes. Ce à quoi j’ai répondu que si un jour j’écrivais un roman cela serait de la science-fiction, que c’était mon dada mais que je n’avais pas d’idée, pas pour un roman.
Il m’a alors rétorqué que ce n’était pas le seul genre, qu’il y avait aussi la romance. Je crois que j’ai dû lui couper la parole et dire que c’était pas vraiment mon truc, que c’était pas un truc que je lisais et que je ne me voyais pas vraiment en écrire, que si j’en écrivais, cela serait sous forme de poème, rien d’autre.

Je me souviens qu’il a souri et qu’il m’a répliqué que je ne devais pas me braquer, que les histoires d’amour n’étaient pas nécessairement synonymes d’histoires à l’eau de rose, que les filles n’étaient pas toujours des princesses en détresse.

Ce qu’il s’est dit ensuite, je ne m’en souviens plus. Il m’a encouragée à continuer,  mais au-delà de ça, trou noir.

15 years ago – Cesson-Sévigné, the aptly named Lycée Sévigné.

On the occasion of the Printemps des poètes, the high school offered the students who wanted to participate to expose their works. Some of my first series of words thus ended up plastered here and there. Mostly proses about Mother Nature, death and remembrance, nothing fancy, but first amazed looks and compliments from strangers and first prideful moment for a few words aligned.

I remember a discussion with my bio teacher – Mr. Boëdec – thirty-year-old passionate about his field, never short of anecdotes, the kind of teachers you adore.
The corridor was almost empty; I certainly must have been scribbling down a few words on a notebook.

He must have had read some of my series of words because one of his first questions was about my subjects choice: why the scientific subjects and not the literary subjects?

Answer quite simple: I loved science and even though I was devouring book after book (starting with Asimov and the Tolkien's trilogy devoured in less than a week and of which first part adaptation only just came out on theater), I only just discovered Charles Baudelaire and my taste for the French language this very same year – thank you Mrs. Windenberger.
Not to mention that choosing the literary subjects meant no more bio, no more chem., less maths, resuming Latin, starting philosophy and starting Greek or a third modern language, all of this on top of Spanish and English. And languages, at the time, those were not, really not, my thing at all.

To this, he told me that it was the same for him but that at the time he was writing for the school paper.
Then he asked me if one day I wanted to write a novel or if I only wanted to write poems. To which I answered that if one day I ever wrote a novel, it would be about science fiction, that this was my hobby-horse but that I had no idea, none for a novel.
He then retorted to me that it wasn’t the only genre, that there was also romance. I think I must have cut him short and said that it wasn’t my thing, that it wasn’t something I read and that I didn’t really see me writing about it, that if I ever wrote about it, it would be in the form of a poem and nothing else.

I remember him smiling and retorting that I shouldn't be dead set against it, that love stories were not necessarily synonymous with slushy stories, that girls were not always princesses in distress.

Of what was said afterwards, I can’t remember. He encouraged me to carry on, but beyond that, zip.




Il y a 15 ans, l’écriture c’était nouveau.

Presque.

En tout cas, je ne m’imaginais pas être publiée un jour, de quelques manières que ce soit ; encore moins que le premier texte publié serait une nouvelle centrée sur un amour non partagé.

Ceci dit, si la pseudo-suite de Rêve… prend des allures de nouvelle gothique flirtant avec le fantastique, je reste persuader que mon premier roman, si roman il y a, dégoulinera de science-fiction.

Et à notre époque, y’a de quoi faire.

Un récent reportage sur l’immortalité tant convoitée par l’homme m’a plongée dans une réflexion par très réjouissante.

Mon imagination s’est un peu emballée.
Vous le savez déjà si vous me suivez depuis un moment, les robots et l’intelligence artificielle ne se rassurent pas énormément. Loin de là.

Et depuis ce reportage, depuis que certains scenarii catastrophes se sont formés, je me dis que j’ai matière à en tirer un roman, ou même plusieurs. Sauf que, je doute en écrire un, du moins pour le moment, la nouvelle reste ma forme de prédilection.

La seule fois que j’ai écrit un truc qui s’apparentait à de la science-fiction, je devais être au collège. J’avais imaginé une piscine dont le fond réagirait en fonction de la personne qui y nagerait, qui détecterait les mouvements de panique et qui s’adapterait immédiatement au nageur pour qu’il ait pied.
Mon prof de français de l’époque m’avait dit que j’avais trop d’imagination et d’être un peu plus sensée.
Quand on sait qu’aujourd’hui, il existe des piscines à fond mobile, innovation française, je me dis que mon trop-plein d’imagination n’est peut-être pas si à côté de la plaque que ça, que mon idée futuriste pourrait très bien devenir une réalité d’ici quelques années.

Alors, quand mon imagination invente des scenarii catastrophes, l’épisode de la piscine ne rassure pas vraiment.

15 years ago, writing was new.

Sort of.

In any case, I didn’t picture myself being published one day, in whichever way may be; even less that the first published text would be a short-story focusing on an unshared love.

That being said, if the pseudo-sequel of Rêve… takes on an air of a Gothic short-story flirting with the Fantastic, I remain convinced that my first novel, if novel there is, will be dripping of science fiction.

And nowadays, there’s plenty to go by.

A recent reportage about the immortality so coveted by man got me immersed in not so much delightful thoughts.

My imagination got a tiny bit carried away.
If you have been following me for a while, you already know about it, robots and artificial intelligence don’t really put my mind at ease. Far from it.

And since this reportage, since the formulation of some disastrous scenarii of mine, I think there is material enough for a novel, or even more. Except that I doubt writing one, at least at the moment, the short-story still remains my writing form of choice.

The only time I wrote something that resembled science fiction, I must have been in high school. I had pictured a pool the floor of which would react accordingly to the person in it, the floor of which would detect panic motions and adapt right away for the swimmer to be able to touch the bottom.
At the time, my French teacher said that I had too much imagination and that I should be a little more reasonable.
When you know that today exit pools with movable floor, French innovation, I think that maybe my overflowing imagination wasn’t so much far off the mark, that my futuristic idea could very well be a reality within the few years to come.

So, when my imagination creates disastrous scenarii, the pool episode doesn’t really put my mind at ease.

La Chute d'Icare ¤ Pieter Brueghel l'Ancien (1558)
Van Buuren Museum
L’homme court à sa perte dans l’indifférence la plus générale, du moins dans l’indifférence du plus grand nombre.

Mais le Déluge à venir ne me semble pas si éloigné que cela. Qu’on s’entende bien, le Déluge n’a pour moi qu’une valeur métaphorique mais il va bien avoir lieu. Tôt ou tard, et je crains que cela ne soit plus tôt que tard.

Et il ne faudra pas aller pleurer dans les jupes de votre Dieu. Ce qu’il va se produire, ce qu'il est déjà en train de se produire, n’a strictement rien à voir avec Dieu ou Son divin courroux, mais tout à voir avec la connerie bassement humaine…

Mes idées de nouvelles axées science-fiction me donnent parfois la chair de poule.

Affaire à suivre, mais vous pourriez peut-être bientôt en voir les premiers mots.

Mankind is on the road to ruin in the utmost general indifference, at least in the indifference of the vast majority.

But to me, the Deluge to come does not seem that far away. Let’s be clear, the Deluge only has a metaphorical value to me, but it will come to pass. Sooner or later, and I fear it would be sooner rather than later.

And there would be no use to weep and tie to your God’s apron strings. What is about to happen, what is already happening, has nothing to do with God or His divine wrath, but everything to do with the shamefully human stupidity…

My science-fiction-focused new ideas give me goosebumps.

Wait and see, but you could be seeing soon the first words of these ideas.

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